Dans cet article je vous propose une sélection de livres pour la jeunesse qui, sans forcément se revendiquer du féminisme, véhiculent tout de même certaines de ses valeurs. Prêt·e·s ? C’est parti !
- Bergères Guerrières, de Jonathan Garnier et Amélie Fléchais
Cette bande-dessinée passe allègrement le test de Bechdel (normalement réservé au cinéma, mais pourquoi se priver de l’appliquer en littérature ?) puisque son intrigue se situe dans un village dont tous les hommes sont partis, mobilisés par une guerre mystérieuse et interminable. Résultat : ce sont les femmes qui gèrent… bah, tout, en fait. Elles décident même de fonder un ordre réservé aux plus braves d’entre elles, celui des Bergères guerrières. Son objectif ? Assurer la sécurité du village et des animaux. C’est déjà une idée assez chouette en soi, mais l’autre point fort de ce livre, c’est la diversité (relative, ceci-dit) de ses personnages féminins. Toutes les tranches d’âge sont représentées, il y a une grande variété de morphologies et de visages, des femmes avec des cicatrices ou des cheveux en broussaille… C’est plutôt rafraîchissant, même si ça devrait un peu être la base dans toutes les fictions.
Dès 10 ans.
- Allô sorcières, tome 1 : Viser la Lune, d’Anne-Fleur Multon
L’autrice de ce roman est ouvertement féministe, et souhaite clairement bousculer le paysage de la littérature jeunesse en mettant (enfin !) à l’honneur des héroïnes issues de minorités sous-représentées. Sur les quatre protagonistes, seule Maria est blanche (vous en connaissez beaucoup, vous, des romans jeunesse où c’est le cas ?). Azza pratique du sport de haut niveau et porte parfois le voile, la maman noire d’Aliénor est astronome (et sa tante est bricoleuse), Itaï est aussi passionnée de jeux-vidéos que de maquillage… On sent une réelle volonté de sortir des stéréotypes tout en abordant sans détour les thématiques du sexisme et du racisme. Le traitement de ces questions manque sans doute de profondeur, mais peu importe : Viser la Lune a le mérite de dépoussiérer les codes du genre.
9-12 ans.
- La femme à barbapapa, de Renaud Perrin
La place d’un tel album dans cette sélection est peut-être discutable, je vous l’accorde. La femme à barbapapa n’est pas vraiment porteur d’un message féministe, mais… quand même, il y a quelque chose qui me touche dans cette représentation si poétique et si douce d’une femme à barbe forte et indépendante, qui n’aspire qu’au bonheur. Son apparence physique est un non-débat, un non-problème : elle est très bien telle qu’elle est, et n’a aucune difficulté à se faire aimer. Lorsqu’une fillette à barbichette débarque dans sa vie, vient la possibilité de transmettre une certaine manière d’être au monde, aussi jolie que légitime.
Dès 5 ans.
- Miss Charity, de Marie-Aude Murail
Je vous bassine un peu avec Miss Charity, mais ce n’est pas l’un de mes romans préférés pour rien ! Son héroïne, largement inspirée de Beatrix Potter, est extrêmement inspirante dans sa manière de bousculer les conventions de son époque. Assoiffée de vie, de créativité, de savoir, Charity Tiddler étouffe en tant que jeune fille de la bonne société anglaise du XIXème siècle. Elle ne cessera de revendiquer bien plus que les simples miettes qui lui sont réservées… En filigrane, d’autres questions sont traitées : le mariage, la morale, les classes sociales, la religion ou encore la famille. Bref, Miss Charity est à mon sens un roman résolument féministe et résolument passionnant, porté par une plume riche et vivante… Ce serait bien dommage de passer à côté, moi j’dis.
Dès 12 ans.
- Anna qui chante, de Sonia Paoloni et Eloïse Rey
Cet album aux couleurs gaies nous parle pourtant de tristesse ; celle de Judith, une princesse de 9 ans que le roi maintient à l’écart du monde extérieur afin de l’en protéger. Pour ne pas dépérir d’ennui, il lui faudra trouver le courage d’exprimer haut et fort son refus : refus du mariage forcé auquel elle est destinée, refus d’une existence monotone et solitaire, refus de la tyrannie de son père. Le thème de la révolte est ainsi au centre de ce récit, qui valorise par ailleurs la solidarité entre les petites filles. Dans cette histoire inspirée de l’univers des contes traditionnels, c’est la princesse qui se libère elle-même !
Dès 5 ans.
- George, d’Alex Gino
L’héroïne de George est une petite fille transgenre qui rêve de décrocher le premier rôle d’une pièce de théâtre organisée par son école. Le souci ? Il s’agit d’un premier rôle féminin, et pour l’instant, tout le monde pense que « George » est un garçon. Et alors, quand bien même ? Pourquoi une fille ne pourrait-elle pas jouer le rôle d’un garçon, et vice versa ? George pose ainsi l’air de rien un tas de questions sur les normes de genre (et les normes cisgenres à fortiori), ainsi que le carcan qu’elles représentent. Alex Gino représente avec justesse la façon dont le poids des conventions sociales étouffe la créativité et freine l’épanouissement des enfants.
9-12 ans.
- Les Petites Reines, de Clémentine Beauvais
Lorsque Mireille, Hakima et Astrid sont élues boudin de bronze, d’argent et d’or par les élèves du collège-lycée Marie-Darreussecq de Bourg-en-Bresse (vous voyez l’ambiance, déjà), elles se lient d’amitié et s’embarquent dans un projet un peu dingue : se rendre jusqu’à Paris en vélo dans le but de s’incruster à la garden-party de l’Élysée. Les Petites Reines nous cause donc normes (genrées) de beauté et harcèlement scolaire, tout en dépeignant des héroïnes qui, pleines de ressources, apprennent à faire front. Elles ne sont pas jolies, et alors ? Elles sont bien d’autres choses, et ont bien l’intention de clouer le bec aux mauvaises langues.
Dès 13 ans.
- Bouche cousue, de Marion Muller-Colard
Dans ce court roman, le neveu de la narratrice reçoit une gifle pour avoir embrassé un garçon. Elle décide alors de lui adresser une lettre dans laquelle elle raconte son amour de jeunesse pour une autre fille de son lycée. Ce récit mélancolique et désabusé interroge le tabou qui pèse sur les adolescentes, à plus forte raison lorsqu’elles sont bisexuelles ou lesbiennes : désir et sexualité, appropriation d’un corps qui change, premières règles… En évoquant ainsi le poids des normes sociales, des attentes familiales et des non-dits, Marion Muller-Colard s’inscrit à mon sens dans une réflexion fondamentalement féministe. Pour ne rien gâcher, sa plume est d’une grande délicatesse – et quand le fond est aussi riche que la forme, moi, j’applaudis de toutes mes tentacules.
Dès 13 ans.
Quels livres jeunesse véhiculent un message féministe, selon vous ?
Excellent! Est-ce que tu pourrais préciser la tranche d’age?
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C’est une bonne idée ! Je viens de les ajouter 🙂
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Merci pour cette article ! L’idée est vraiment très chouette de mettre en avant des livres jeunesse féministes et qui prônent la diversité.
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Merci à toi ! 🙂
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Très chouette, et bien envie de lire ceux que je ne connais pas encore hihi. Par contre, ça ne me donne toujours pas envie pour Miss Charity (trop trop désolée haha). Et spontanément sans trop réflechir s’il fallait en ajouter je dirais la trilogie de la fille du futur de Nathalie Stragier et puis Maresi. En album je dirai Même les princesses pètent et Une amie pour la vie d’Emmanuelle Houdart. La série des Mademoiselle Zazie aussi.
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Les Mademoiselle Zazie ❤ Je ne connais pas les autres, je note ! Pour Miss Charity… mon p'tit cœur souffre 😀
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La trilogie de Nathalie Stragier je l’aime vraiment beaucoup ! Sinon en littérature jeunesse côté ado il y a aussi La lune est à nous ˆˆ
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Oh oui je veux tellement lire La lune est à nous !
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Je ne sais pas si tu connais mais Blanche-neige et les 77 nains est pas mal aussi dans son genre 🙂
Bel article en passant 😀
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Je ne connaissais pas mais comme c’est édité par Talents Hauts, ça ne peut qu’être intéressant 😀 Merci beaucoup pour la suggestion !
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Bergères guerrières est tellement bien ! ❤
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Oui ! ❤
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C’est quand je constate avoir lu la majorité des ouvrages présentés que je me dis que j’oriente drôlement bien mes lectures quand même 😉 Dans le même esprit que Miss Charity -coup de cœur intergalactique pour moi-, je conseillerais « Calpurnia » de Jacqueline Kelly ! Transpose l’histoire au Texas à l’aube du 19e, avec une petite fille très curieuse en matière de sciences, et c’est le banco 🙂 Dans « L’effet Matilda » tu as aussi une petite dimension féministe je crois…à vrai dire je ne l’ai pas encore lu, il est en attente dans ma PAL mais de base c’est pour ça que je comptais le découvrir !
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Oh le résumé de Calpurnia est très alléchant ! Merci pour la suggestion ! Je n’ai pas lu L’effet Matilda non plus mais il donne effectivement l’impression de véhiculer des idées féministes… Si jamais tu le lis ça m’intéresserait de voir ce que tu en penses, peut-être que ça me motiverait à le lire aussi 🙂 Merci pour ton passage par ici !
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Je t’en prie ! Je découvre tout juste ton blog après avoir eu un premier aperçu sur Twitter, et ce que j’y vois me plait bien 🙂 Pour « L’effet Matilda », je pense l’acheter pour la médiathèque où je bosse alors tu devrais voir passer ça 😀
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Chouette ! 😀 Et de nouveau merci haha, ça me fait plaisir ❤
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